Publié le 20 février 2020 | par Rédaction

La “normalisation” du droit à déduction de la TVA de l’essence se poursuit en 2020. Le taux de récupération passe à 60 % pour l’essence des VP et des VUL.

Sommaire

  1. MALUS : de 110g et jusqu’à 20000€
  2. TVS : une compensation en trompe l’œil
  3. Amortissement : bas du plafond
  4. TVA : droit à déduction irréversible
  5. Les IK : Un barème électrique ?
  6. Avantages en nature : les VE enfin !

    La loi de finances pour 2020 a fait subir un grand toilettage à la fiscalité automobile, mais la TVA qui n’est en rien reliée aux émissions de CO2, est restée à l’écart des débats. Pour la TVS, le malus, l’amortissement et pour la plupart des dispositions fiscales la définition du véhicule de tourisme s’entend désormais ”au sens du 5° de l’article 1007 du CGI”. Mais cette définition ne vaut pas pour la TVA qui a la sienne propre et exclut plus rigoureusement du droit à déduction les véhicules conçus pour transporter des personnes ou à usages mixtes.
    Nulle part dans l’article 69 de la loi de finances il n’est fait mention d’une quelconque modification à la TVA appliquée à l’automobile et en particulier d’une quelconque modification de l ‘article 206 de l’annexe II du CGI. Mais cela n’empêche pas la TVA de l’essence de poursuivre son lent processus de normalisation, vers la parité avec les autres carburants. L’essence, contrairement aux autres carburants consommés par les véhicules de l’entreprise, n’était en effet, jusqu’au 31 décembre 2016, admise à aucune récupération de TVA, y compris quand cette essence était consommée par des VUL pourtant, eux mêmes, éligibles au droit à déduction (à 100%). Cette disposition fiscale ubuesque qui perdurait depuis la nuit des temps est maintenant entrée depuis trois ans dans un (lent) processus de “normalisation“.

TVA de l’essence : récupérable à 60% en 2020

tva_dossier4.jpgEn fait ce programme de normalisation a été défini par la loi de finances pour 2017 dans son article 31 qui a modifié le 1° du 4 de l’article 298 du CGI. Mieux qu’une promesse électorale qui parfois s’oublie ou manque de précision et qui survit rarement aux changements de majorité, l’inscription dans la loi des paliers successifs du droit à déduction de l’essence en garantit maintenant l’aboutissement quasi certain.
Pour l’essence consommée par les VP, la récupération a été autorisée le 1er janvier 2017… mais à hauteur de 10% seulement, avant de passer à 20% en 2018 et à 40% en 2019. En 2020, un nouveau palier de progression de 20% a porté le taux de déduction à 60%. En principe cette évolution aboutira le 1er janvier 2021, l’an prochain donc, à un taux de récupération de 80%, à parité avec le taux de déduction accordé au gazole et à l’E85 quand ils sont utilisés par des VP.
Pour l’essence consommée par les VUL, la TVA n’est devenue déductible qu’un an plus tard, le 1er janvier 2018, à hauteur de 20% dans un premier temps puis, de 40% en 2019. Ce 1er janvier 2020, la normalisation a franchi un troisième palier et le taux de déductibilité est passé à 60% ! Pour parvenir à 100%, il faudra encore deux nouveaux paliers annuels de 20% et donc patienter jusqu’au 1er janvier 2022.

L’évidence du diesel… moins incontestable

Désormais à 60% pour les VP et les VUL, les taux de récupération pour l’essence ne sont donc toujours pas équivalents à ceux accordés au gazole (ou à l’E85), mais ils tendent à s’en rapprocher et la parité avec le gazole sera acquise pour les VP en 2021 et pour les VU en 2022. Dans cette perspective, la société qui acquerrait un véhicule particulier à motorisation essence, par exemple cette année en juillet pour le conserver trois ans, bénéficierait pour son carburant de : 60% de récupération de TVA sur les six mois de 2020 et de 80% pendant les 30 mois suivants (soit un taux moyen d’environ 77% sur les trois ans). Après la parité du tarif à la pompe, cette “presque parité” de la récupération de TVA ne laisse guère au diesel que l’avantage d’une moindre consommation… variable selon les modèles et les choix de motorisations, mais se situant couramment dans une fourchette de 1,5 à 2 l/100. Pour des VP professionnels qui parcourent couramment autour de 30000 km/an, cette moindre consommation reste déterminante, mais on voit bien que progressivement l’évidence du diesel ne s’impose plus de manière aussi incontestable et doit observer avec pertinence le surcoût des versions diesel, surcoût lui-même évolutif en fonction du marché et des valeurs résiduelles.

La trajectoire semble acquise

super_dossier4.jpgL’épisode de la trajectoire tarifaire du carbone l’an dernier nous a alerté sur la fragilité des trajectoires fiscales pluriannuelles qui, même déjà inscrites dans la loi, peuvent toujours être infléchies ou “suspendues” par une nouvelle loi. Aujourd’hui alors que les ventes de motorisations diesel ont fortement chuté essentiellement au bénéfice des motorisations essence, certains font semblant de s’étonner de la soudaine remontée des émissions de CO2… qui baissaient régulièrement depuis une dizaine d’années. L’écologisme est capable de justifier et son contraire mais même s’il devait lâcher la bride sur le diesel, il est peu probable que cela se traduise par un renoncement à la finalisation du programme de parité fiscale. Et il est de surcroît en matière de TVA impossible de faire marche arrière.

Des clauses de gel depuis 1977

En effet, si dans l’Union Européenne, la fiscalité relève très largement de la compétence nationale, on ne peut pas faire n’importe quoi avec la TVA qui est encadrée par des directives contraignantes et notamment, la directive 77/388/CEE, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires. Laquelle directive avait ouvert le droit à déduction de TVA quand : “les biens et services sont utilisés pour les besoins des opérations taxées”. Tout en excluant les “dépenses de luxe, de divertissement ou de représentation” et en reconnaissant à chaque État membre (sous expresse réserve de consultation d’un comité TVA) la faculté pour des raisons conjoncturelles, d’exclure partiellement ou totalement du régime des déductions, certains biens d’investissement. Enfin cette sixième directive incluait la fameuse “clause de gel”, qui a autorisé les États à maintenir les exclusions à déduction qui existaient déjà (avant l’adoption de la directive 77/388/CEE) mais les a empêché d’en créer de nouvelles jusqu’à l’adoption d’une nouvelle directive harmonisant ces mesures d’exclusion.

Une seule rangée de sièges

La logique “basique” de cette directive 77/388/CEE voudrait donc que les investissements dans des véhicules utilisés pour les besoins de l’activité de l’entreprise ouvrent droit à déduction… dès lors qu’ils n’entreraient pas dans le cadre des “dépenses de luxe, de divertissement ou de représentation”. Mais déjà avant l’adoption de la directive en 1977, il existait déjà en France (où la TVA avait été appliquée dès 1954) une exclusion des véhicules de tourisme. Cette déduction est donc restée “gelée” bien que Cour Européenne a souvent rappelé dans ses arrêts (comme dans l’affaire Stradasfalti contre le fisc italien en septembre 2006) que les États n’étaient pas autorisés à adopter des mesures d’exclusion de déduction de TVA sans limitation dans le temps. Ni même d’utiliser des mesures d’exclusion à caractère structurel dans but de réduire le déficit budgétaire et de permettre le remboursement de la dette. Après 43 ans, il faut croire que la “limitation dans le temps” reste une notion très relative.
Nous conservons donc notre système franco-français un droit à déduction pour les véhicules utilitaires et une exclusion de ce droit pour les véhicules de transport de personnes et les véhicules à usage “mixte”. Cette exclusion du droit à déduction n’est pas plus affectée par le règlement UE 2018/858 et son annexe I qui classe par les catégories de véhicules qu’elle ne l’était par la directive 2007/46/CE (abrogée par l’UE 2018/858). L’exclusion est en effet basée sur les définitions antérieures et notamment la fameuse considération d’une “unique rangée de sièges” protégée par la clause de gel de la directive 77/388/CEE.

Les 60% de l’essence sont irréversibles

Toutefois cette directive 77/388/CEE a admis les clauses de gel elle a aussi fait du droit à déduction la règle standard, il est donc devenu interdit depuis 1977 de créer nouvelles exclusions. La France a payé pour s’en souvenir après avoir tenté en 1998 de supprimer les 80% de déduction du gazole, ce qui avait valu à notre pays une condamnation de la CJCE (14 juin 2001, C-345/99) et un retour obligé à la case départ.
Pour les mêmes raisons, le droit à déduction de 60% appliqué à l’essence depuis ce 1er janvier, peut désormais être considéré comme irréversible. Ce n’est pas encore le cas pour les paliers supplémentaires prévus pour 2021 et 2022 qui n’étant pas entrés en application pourraient encore en théorie être différés ou même annulés sans créer une nouvelle exclusion. Mais politiquement rien ne permet d’imaginer ce retournement, et si la mise en œuvre du droit à déduction de la TVA de l’essence a été étalée sur cinq ans, c’est probablement moins pour des considérations raisonnées de stratégie énergétique et industrielle que par… prudence budgétaire. La TVA est en effet pour l’État, le principal vecteur de recettes fiscales.

La TVA en pratique

Pour les véhicules achetés (au comptant ou à crédit), la TVA est acquittée lors du règlement. Pour les véhicules en crédit-bail, elle est acquittée sur les loyers au fur et à mesure de leur échéance et idem pour les véhicules en LLD.

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Le 6° du 2 du IV de l’art. 206 de l’annexe II au CGI

Selon le 6° du 2 du IV de l’article 206 de l’annexe II du CGI, sont exclus du droit à déduction les véhicules ou engins, quelle que soit leur nature, conçus pour transporter des personnes ou à usages mixtes, qui constituent une immobilisation ou, dans le cas contraire, qui ne sont pas destinés à être revendus à l’état neuf. On voit bien que ce texte n’utilise pas le même vocabulaire que le 5° du 1007 du CGI qui considère les véhicules de tourisme M1, les véhicules à usages multiples N1 qui sont destinés au transport de voyageurs et de leurs bagages ou de leurs biens, et les pick-up 5 places pour les assujettir à la TVS. Là on ne fait pas dans la dentelle ce sont tous les véhicules ou engins, quelle que soit leur nature, conçus pour transporter des personnes ou à usages mixtes qui sont exclus du droit à déduction. Certes les deux nomenclatures se recouvrent largement mais pas totalement. Selon la doctrine actuelle les utilitaires à cabine approfondie n’entrent pas dans la définition du véhicule de tourisme au sens du 5° du 1007 et d’ailleurs la présence du pick-up 5 places pourrait sembler a contrario en exclure un éventuel et audacieux pick-up quatre places. Mais pour la TVA inutile de tergiverser, au-delà d’une seule rangée de sièges c’est l’excommunication, le bannissement du royaume des utilitaires et de sa TVA récupérable.
– la TVA n’est pas récupérable sur les véhicules conçus pour le transport de personnes ou à usage mixte sauf… pour les véhicules nécessaires à l’activité de l’entreprise “en raison même de son objet”. Attention à bien lire la définition dans son intégralité il ne suffit pas que ces véhicules soient nécessaires à l’activité, mais que l’activité elle-même ait pour objet le transport de personnes (quel que soit leur état de santé puisque ce “sauf” concerne notamment les taxis, les véhicules auto-école, les ambulances et les corbillards… affectés à titre exclusif à l’activité professionnelle ! En conséquence, on ne va pas à la plage en corbillard même s’il dispose d’un compartiment réfrigéré idéal pour garder au frais le panier du pique-nique et la bouteille de rosé.
L’exclusion ne concerne pas non plus les véhicules destinés à la location ou à être revendus à l’état neuf : “l’exclusion ne concerne pas les véhicules qui présentent le caractère d’éléments de stock. Les concessionnaires ainsi que tous les négociants opèrent donc dans les conditions normales la déduction de la taxe ayant grevé l’achat de tout véhicule qu’ils destinent à la revente à l’état neuf.”
La TVA est récupérable pour un VUL a une seule rangée de sièges qui “répond aux besoins des opérations taxées de l’entreprise”.
Si un VUL récupère la TVA comme une brouette ou une bétonnière, c’est qu’il a vocation évidente à un usage professionnel et mais aussi qu’il “répond aux besoins des opérations taxées de l’entreprise”.
Le plateau-benne de l’entreprise générale de bâtiment, le fourgon-atelier du plombier chauffagiste, la multitude des camionnettes d’artisans ou de société de messageries ou de services après-vente, sont légitimes et “répondant aux besoins des opérations taxées de l’entreprise” peuvent récupérer la TVA et bénéficier du statut fiscal de VU. Idem pour les “VU dérivés de VP” ; l’administration fiscale précisant d’ailleurs : “…le dispositif d’exclusion du droit à déduction ne s’applique pas (…) aux véhicules dits “dérivés VP” qui ne comportent que deux places, également commercialisés sous les appellations société, affaires ou entreprise ”…
La déduction implique l’utilité du VUL pour l‘entreprise et une restriction d’usage. Qu’un VUL soit éligible à la déduction de TVA ne signifie pas qu’une entreprise puisse déduire la TVA d’un utilitaire dont le seul objet serait la passion du gérant pour la brocante ou les travaux de retape de sa résidence secondaire. La fiscalité privilégiée du VUL s’accompagne de considérations d’utilité pour l’activité de l’entreprise et “inversement” de restrictions de jouissance pour l’utilisateur, ce que l’administration fiscale résume dans son critère de “destination dans l’entreprise”. S’il n’est pas impossible d’étendre l’usage strictement professionnel d’un VUL au trajet domicile-travail (et sous conditions pour l’URSSAF) il demeure une contrainte qui ne peut être transgressée, c’est celle de la simple rangée de sièges qui limite les VUL à deux places, voire trois quand la largeur de cabine permet l’installation d’une banquette double sur laquelle deux passagers (éventuellement bien serrés) peuvent accompagner le conducteur.

Dixit le BOFPI du 1er février 2017

cee_dossier4.jpgLa règle générale rappelée par le Bulletin Officiel des Finances Publiques Impôts du 1er février 2017 (BOI-TVA-DED-30-30-20-20170201) énonce que :
“Selon le 6° du 2 du IV de l’article 206 de l’annexe II au CGI sont exclus du droit à déduction les véhicules ou engins, quelle que soit leur nature, conçus pour transporter des personnes ou à usages mixtes, qui constituent une immobilisation ou, dans le cas contraire, qui ne sont pas destinés à être revendus à l’état neuf.
Il en est de même des éléments constitutifs, des pièces détachées et accessoires de ces véhicules et engins (CGI, ann. II, art. 206, IV-2-7°).
Les biens visés par cette exclusion doivent donc répondre simultanément à deux sortes de critères :
– critère fondé sur les caractéristiques du véhicule ;
– critère fondé sur la destination du véhicule dans l’entreprise.”
Le Bofip du 01/02/2917 rappelle d’ailleurs que : “Eu égard à ses caractéristiques intrinsèques et nonobstant l’homologation des véhicules de transport de personnes comme véhicule utilitaire, un véhicule à cabine approfondie, qui dispose de cinq places dont trois peuvent, au besoin, être escamotées afin d’agrandir l’espace de chargement, est conçu pour un usage mixte et, par suite, est exclu du droit à déduction”. Et si nécessaire il précise qu’une solution identique a été retenue dans un arrêt du Conseil d’État du 30 mars 2007. (CE, arrêt du 30 mars 2007, n° 287600, GFA Domaine de Font Mars).

Entretien, maintenance et carburants

La distinction entre véhicules, exclus ou pas droit à déduction de TVA, se prolonge sur leurs frais d’entretien et de maintenance (pièces et M.O.). En gros on peut considérer que la TVA des frais d’entretien et de maintenance est récupérable intégralement pour les utilitaires, mais pas pour les véhicules de tourisme ni même pour les utilitaires à plus d’une rangée de sièges” Avec cependant toutes les réserves, conditions, nuances et subtilités qui ont concerné la TVA du véhicule lui-même. (CGI, ann. II, art. 206, IV-2-7°).
Sur les carburants et énergies, les distinctions sont plus complexes, car elles se font selon les véhicules utilisateurs mais aussi selon les carburants.
– Pour les VU non exclus du droit à déduction : la TVA du gazole, de l’E85, du GPL, du GNV et de l’électricité, est déductible intégralement. Mais pour l’essence à 60% seulement en 2020… même pour remplir le réservoir d’un engin indiscutablement utilitaire.
– Pour les véhicules “de tourisme” ou les exclus du droit à déduction, la TVA est déductible intégralement (à 100%) pour le GPL, le GNV et l’électricité, mais à 80% seulement pour le gazole et l’E85. Et depuis le 1er janvier dernier à 60% pour l’essence !

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