Publié le 12 novembre 2019 | par Rédaction

Christophe de Valroger (Bridgestone) : « Les pneumaticiens ont le devoir d’éduquer le client »

Le vice-président de Bridgestone Europe en charge de la stratégie, des produits et des solutions nous éclaire sur le rôle du pneumatique, son évolution et la stratégie de Bridgestone.

Kilomètres Entreprise : Comment évolue le marché du pneumatique ?
Christophe de Valroger : De façon générale, le marché reflète assez fidèlement la croissance et le dynamisme de l’environnement économique. Plus spécifiquement, depuis 2015, nous vivons en première monte, une période assez favorable aux pneumatiques. Chez les constructeurs, les motoristes ont fortement travaillé et il reste moins de marge de progression sur les moteurs thermiques qu’il y a quelques années. Il reste encore du potentiel dans le domaine de l’aérodynamique. Il est possible d’abaisser les masses, mais la marge est faible car les matériaux exotiques sont chers. Enfin, il reste le pneumatique qui offre un grand potentiel de progrès pour réduire sa résistance au roulement avec de nouveaux matériaux ou des procédés de fabrication innovants.

KMS : Justement, à quoi peut ressembler le pneumatique de demain ?
C ; de V. : Le marché pousse toujours vers des pneumatiques de plus en plus grands en diamètre. En première monte, cette tendance est partagée par la quasi-totalité des constructeurs. Il y a deux raisons principales à cela : le style d’une part et d’autre part, un diamètre accru est un bon moyen d’abaisser la résistance au roulement. Réduire celle-ci permet de limiter la trainée du pneumatique au sol, donc la consommation de carburant que cela entraîne. Techniquement, un grand diamètre limite la déformation du pneumatique dans l’aire de contact, donc la déperdition d’énergie. Et, nous observons également une tendance à la réduction de la largeur des pneumatiques.

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KMS : Y a t-il des contraintes spécifiques au véhicule électrique ?
C. de V. : Le pneumatique pour véhicule électrique se trouve dans un champ de contraintes qui apparaissent contraires. Réduire la résistance au roulement en accroissant le diamètre et en limitant la largeur est une voie. Mais, les pneumatiques doivent également avoir une taille suffisante pour porter la voiture et son fort emport de batteries. Plus il y a de poids, plus on est obligé d’avoir des pneumatiques qui résistent à la charge. Les pneus pour véhicules électriques répondent à ces deux impératifs, voilà pourquoi ils sont spécifiques à ces applications.

KMS : Comment se répartit l’activité de Bridgestone ?
C. de V. : Bridgestone réalise 60 % de ses ventes sur le segment des voitures particulières et utilitaires légers et 40 % dans le poids lourds. Sur ce dernier marché, l’un des problèmes réside dans le fait que le produit est assez standardisé et qu’il est difficile de s’y différencier par autre chose que le prix.

KMS : Le pneumatique de première monte est-il toujours le meilleur ?
C. de V. : D’un point de vue technologique, le pneumatique de première monte est celui qui convient à la voiture notamment en ce qui concerne la résistance au roulement lors de l’homologation de la voiture. Mais au remplacement, l’utilisateur peut rechercher un autre compromis de performances. Il peut trouver, dans l’offre des grandes marques, ce qu’il recherche. Par ailleurs, en cas d’hésitation, garder le pneumatique d’origine constitue un choix qui rassure.

KMS : Pourquoi le pneumatique permettant de rouler après une crevaison ne s’est pas imposé ?
C. de V. : Bridgestone pense toujours que le run flat constitue une très bonne solution que nous continuons à encourager. Actuellement, près de 30 à 40 % des BMW vendues sont équipées de pneumatiques run flat. D’autres solutions existent comme le gel interne sur face intérieure du pneumatique. C’est notamment le choix de Volkswagen.

KMS : Justement, l’un de vos concurrents essaie de communiquer sur la performance de ses produits. Est-ce, à votre sens une démarche intéressante ?
C. de V. : Ce que Michelin met en avant au sujet des performances du pneumatique usé est prometteur pour l’avenir. Nous sommes attentifs sur ce sujet et tout particulièrement concernant l’adhérence sur sol mouillé. Les manufacturiers des grandes marques ont le devoir d’éduquer le client au sujet du pneumatique. Il est également important de faire savoir que nous réalisons d’importants investissements dans le domaine de la recherche et du développement. L’éducation du client est une croisade de tous les instants.

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KMS : A ce sujet, l’étiquetage sur les performances des pneumatiques vendus au remplacement mis en place depuis quelques années a-t-il donné les résultats attendus ?
C. de V. : Oui, cela a été bénéfique. Les grandes marques ont fait pression pour l’instauration de l’étiquetage et les résultats sont là. L’information du consommateur lui permet de choisir en toute connaissance de cause. De façon générale, notre lobbying est assez actif auprès de l’Union Europeénne. Tout ce qui est réglementaire est bon pour nous.

KMS : Bridgestone a acquis en début d’année Tom Tom Telematics, quelle est l’idée ?
C. de V. : Comme toute entreprise responsable, Bridgestone identifie les tendances de marché. Quel est notre vision ? C’est celle d’un véhicule qui sera connecté, autonome, partagé et électrifié, dit CASE en anglais. Les automobiles connectées, électrifiées et plus ou moins autonomes sont déjà largement connues. L’automobile partagée va progresser dans les villes où l’utilisateur recherche une simple prestation de déplacement. Dans les grandes villes comme Paris, la croissance semble évidente. Pour des distances plus élevées, cela sera moins le cas.
En tenant compte de ces quatre tendances et, au-delà de notre métier de pneumaticien, nous avons estimé il y a quelques années que nous désirions être un acteur de la mobilité. Pour cela, nous avons cherché le métier adjacent qui pourrait nous permettre d’élargir notre champ d’action. Nous avons alors identifié la gestion de flottes d’où l’acquisition de Tom Tom Telematics. Cette entreprise est le leader européen de la télématique avec 900.000 véhicules en Europe dans 50.000 flottes.

KMS : Comment Bridgestone va utiliser les savoirs-faire de Tom Tom Telematics?
C. de V. : Auparavant, nous avions appris en prenant une part du capital de Xee, la start up du groupe Mobivia. Cela nous a permis d’apprendre et de comprendre le marché de la mobilité avant de faire une acquisition. Désormais, avec Tom Tom Telematics, nous visons le marché des solutions de suivi de coûts pour les flottes de poids lourds. Ensuite, nous avancerons pas à pas vers d’autres clients avec des solutions innovantes.
Mais, par ailleurs, nous désirons affermir et développer les positions de Tom Tom Telematics sur son cœur de métier que sont les petites flottes. L’entreprise réalise l’essentiel de son activité avec des flottes de camions. Tom Tom leur propose des solutions de planification de parcours, de maintenance de véhicule, de gestion du temps de travail et d’optimisation administrative.
Tom Tom Telematics est une entreprise très saine, bien organisée et positionnée sur un marché très prometteur. Bridgestone a clairement fait le choix d’acheter le meilleur du secteur. Cela va nous permettre d’améliorer nos performances et nos capacités autour du pneumatique.

KMS : Avez-vous d’autres projets en cours ?
C. de V. : Pas du même ordre, mais nous menons des actions au sens des fonds d’investissements. Nous sommes engagés dans une coopération avec Iris Capital pour un accord de corporate venture dédié à l’identification et au soutien de start-up innovantes dans la mobilité et les services. Nous regardons également parfois des domaines un peu disruptifs.

Propos recueillis par Louis Daubin et Bertrand Gay

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