Publié le 13 février 2021 | par Rédaction

Pour convertir, bon gré mal gré, le marché automobile à l’électrification, un nouvel épouvantail fiscal est “en marche” : déjà à 20000€ en 2019, le malus maximum augmente de 10000 € par an, à 30000€ cette année pour atteindre 50000 € en 2023. Mais personne ne sera oublié, chacun pourra contribuer au grand-œuvre… à hauteur de 50€ dès 133g en 2021 et dès 123g en 2023.

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Dans les entreprises françaises, après quinze ans de TVS/CO2 et de taxes à effets de seuil, il y bien longtemps que l’on a appris à faire ses courses en lisant attentivement les étiquettes. Le TCO ayant pour qualité fondamentale d’être “total”, n’oublie évidemment pas la fiscalité. Ce TCO qui contraint à viser les tranches basses de la TVS au plus juste, conduit naturellement à construire une car-policy qui ne soit pas concernée par le malus… ou très exceptionnellement à la marge.

Le malus était déjà dissuasif à 20000 €

Dès lors, nous n’aurons donc pas l’audace de prétendre que le “malus 30000” des véhicules émettant 219g et plus, fera à l’immense majorité des entreprises françaises l’effet d’un pet sur une toile cirée, mais guère plus… Sinon pour les inciter à conserver leurs distances et même s’éloigner davantage encore de modèles qui devraient aussi s’acquitter sur trois ans de 15 à 23000€ de TVS.
À 30000€ le malus est incontestablement dissuasif et il sera plus encore à 50000€ en 2023, mais comme il l’était déjà à 20000€, cela ne changera rien pour le parc existant, quasiment rien pour les nouvelles immatriculations. On a parfaitement le droit de détester “le gros SUV 4×4” ou de s’agacer au vrombissement d’un V12 qui se dégourdi les soupapes une fois par mois, mais leur impact rapporté à leur nombre et à leur kilométrage réel est infinitésimal. Leur éradication ne permettra pas plus au budget de la Nation de repasser dans le vert, qu’elle arrêtera la fonte de la banquise. Le sujet est hélas plus compliqué !

L’environnement ou la lutte des classes

On comprend que leur caractère ostentatoire, et leur prix puisse sembler indécent, mais alors il n’est plus question de CO2, de NOx ou de particules. Et d’ailleurs le fameux gros SUV 4×4 voué aux gémonies agace t-il moins depuis que doté d’une motorisation hybride et rechargeable, il affiche une consommation de mobylette et des émissions de CO2 à moins de 50g très officiellement certifiées WLTP ?
Peut-être faudrait-il faire la part de ce qui relève de la sauvegarde de l’environnement et éventuellement de la lutte des classes. Les deux approches peuvent s’entendre et méritent toute notre attention intellectuelle ; on ne saurait même exclure a priori une possible convergence des trajectoires, mais à tout mélanger trop vite et n’importe comment, comme choux et carottes, on fait parfois de la soupe.

Pour l’optimisation il y a mieux !

Si l’on peut, non sans raison, s’inquiéter du creusement des inégalités (que d’ailleurs remarque aussi le dirigeant de PME quand il compare ses émoluments à ceux de ses collègues du CAC40), et si l’on doit se scandaliser de l’évasion fiscale, il n’est pas inutile de rappeler que l’automobile est “déjà servie”. Le fameux gros SUV 4×4 s’il vaut 90000€ s’acquitte de 15000€ de TVA, et réintègre 80100 € dans le bénéfice imposable à l’IS. De plus, son utilisateur réintègre aussi 32400€ en trois ans dans les avantages en nature soumis à cotisations sociales et à l’IR… En matière d’optimisation fiscale, il existe des pistes plus séduisantes. Faut-il faire disparaitre par l’effet d’un malus hystérique, une telle machine à cash pour les finances publiques ?

L’acceptabilité aléatoire

En revanche l’évolution du malus posera davantage problème à l’automobile “moyenne”, celle qui parvenue au taux de 95g NEDC pensait être parvenue à satisfaire l’objectif de l’Union Européenne, mais qui par le seul effet WLTP, voit ce taux mesuré à 123g, Une incitation fiscale modérée peut faire sens. Elle peut aider à accepter un surcoût technologique, quand il existe une alternative réaliste. Mais pour une banale berline de segment B à 18300€, l’acceptabilité de l’alternative électrique à 29000€ parait encore très aléatoire, tant économiquement que fonctionnellement. Elle n’est déjà pas évidente pour les entreprises malgré le relèvement du plafond d’amortissement, elle l’est encore moins pour le particulier qui plébiscite de plus en plus le low-cost,

La France n’est pas la Norvège

Il serait souhaitable que la transition écologique redescende sur la planète qu’elle entend sauver, et qu’elle regarde comment vivent les gens, quelles sont les réalités socio économiques et géographiques, territoire par territoire. Quand on nous expose l’exemple norvégien pour nous faire la démonstration de l’acceptabilité du véhicule électrique, il faudrait aussi considérer le niveau de vie moyen (un smic norvégien trois à quatre fois plus élevé que le nôtre), le confort budgétaire assuré par le pétrole de mer du Nord qui permet de subventionner très généreusement la transition, une capacité de production hydro-électrique sans limite, et enfin… regarder une carte routière ou mieux aller faire un tour sur place. En Norvège l’automobile sert surtout à aller jusqu’au ferry et quelquefois d’un ferry à un autre, mais personne ne contourne les fjords par la route… quand elle existe !
En France pour aller de Clermont-Ferrand à Montpellier ou d’Angers à Troyes il n’y a pas de ferry, c’est l’autoroute où une voiture électrique s’époumone très vite, où il faudrait semer plusieurs milliers de bornes de recharge rapide de 150kW, non pas tous les 50 ou 70 km comme les stations-essence, mais tous les 20km pour s’adapter à l’autonomie et éviter les engorgements.

Vers la disparition progressive du thermique ????

Quand on lit dans le rapport final de la convention citoyenne pour le climat : “Nous voulons que d’ici, 2030 le parc automobile ait très sensiblement évolué vers la disparition progressive des véhicules thermiques qui sont les principaux émetteurs de CO2”, on se demande comment pourrait se financer un tel rythme de renouvellement sinon “très progressivement”. En ne livrant plus que des véhicules électrifiés, il faudrait déjà 20 ans pour renouveler le parc français, or l’augmentation très sensible du prix unitaire ne risque pas d’accélérer le mouvement. Quant à la sur-taxation du thermique, elle pourrait au contraire favoriser un vieillissement du parc, ce qui ne serait pas vraiment souhaitable pour la qualité de l’air. Et si dans un avenir radieux on parvenait au tout électrique il faudrait aussi considérer qu’un VE qui parcourt 15000 km/an consomme (à la louche) deux fois plus d’électricité qu’un habitant pour sa consommation domestique… On plante des forêts d’éoliennes ou on rallume Fessenheim.?

Deux ans de progrès technologique annulés.

Tout cela ne signifie pas que certains usages soient incompatibles avec l’électrification et tant mieux, mais attention aux messages de disparition, d’interdiction ou d’éradication du thermique. La proclamation irresponsable de l’éradication du diesel a provoqué un transfert d’un tiers du marché vers l’essence avec des taux de CO2 plus élevés de 15%. Après cela certains se sont étonnés que la baisse constante des taux d’émissions observée depuis une douzaine d’années, marque soudain le pas pendant deux ans. Et avec un bel aplomb, les mêmes en ont attribué la faute aux SUV… Ben voyons ! Peut-être faudrait-il regarder d’un peu plus près et noter que sur le marché français, ces “SUV” ont remplacé des monospaces dont ils ne sont le plus souvent qu’une version customisée dotée d’une simple transmission 4×2 et d’un trois ou quatre cylindres downsizé et aseptisé. Il y a bien une mode du genre SUV, et l’appellation étant vendeuse, les constructeurs en usent, mais classer ces véhicules dans la même catégorie que des vrais SUV ou des 4×4 de franchissement, relève de la manipulation statistique.

Après les sondages, le micro-trottoir ?

Ce qui interpelle aussi dans le rapport final de la Convention Citoyenne pour le Climat, autant que la teneur des propositions, c’est le ton parfois péremptoire : « Nous voulons que d’ici 2030…”. Notre propos n’est évidemment pas de contester la probité intellectuelle, l’engagement républicain et la sincérité de chaque participant qui aura contribué au débat et voté « en son âme et conscience”.
Mais dans une démocratie, la volonté relève du pouvoir politique dont le fonctionnement est défini par la Constitution. Il semble quelque peu incongru de constituer un comité Théodule, tiré au sort donc a priori sur la base d’aucune expertise particulière, sauf celle pouvant résulter d’un heureux hasard… Et pire de donner à croire à ce comité que ses propositions auront quasiment force de projet de loi et qu’en conséquence la représentation nationale devra s’en saisir obligatoirement. C’est faire peu de cas du fonctionnement des Institutions qui dispose qu’un projet de loi émane du premier ministre. On avait déjà la politique des sondages, faut-il institutionnaliser celle du micro-trottoir.

Comme un malaise

Les 150 propositions de la CCC recouvrant des thématiques pas moins essentielles que “consommer, produire et travailler, se déplacer, se loger, se nourrir”, son rapport final en vient à définir un véritable projet de société qui reprend toutes les antiennes du discours écolo. Avec d’ailleurs une certaine cohérence et même beaucoup trop pour que l’on imagine ce projet sorti de nulle part. Il n’est pas interdit de le proposer mais dans ce cas il faut retourner aux urnes. Après la loi mobilités qui avait sous-traité son exposé des motifs à un organisme privé, cette affaire de convention citoyenne traduit un certain malaise tant de l’inspiration politique que du processus de prise de décision.

Un rapport d’évaluation fiscale en octobre !

On ne peut pas embarquer un secteur aussi stratégique que l’automobile et pas davantage la politique énergétique du pays dans une voie radicale sans une structure sérieuse d’évaluation permanente qui inclut tous les acteurs. Il est irresponsable d’avancer au doigt mouillé sans un projet planifié sur le long terme qui bénéficie de l’adhésion populaire. Réduire le sujet à “pour ou contre l’électrification”, c’est un peu comme si face à la pandémie, on n’en était encore à “pour ou contre l’hydroxychloroquine.”
Nous disposons depuis le 16 décembre, d’une étude de l’IFPEN qui évalue les technologies à leur niveau actuel, le gouvernement a promis pour octobre un rapport sur l’évaluation de la fiscalité automobile… Il ne faut pas désespérer.

Au développement durable la Planète reconnaissante !

La commission du développement durable de l’Assemblée nationale, a adopté à l’initiative son rapporteur, dixit : “afin d’encourager le développement des véhicules fonctionnant à l’hydrogène”, deux amendements qui avancent à 2021 au lieu de 2022, l’exonération des véhicules fonctionnant à l’hydrogène… de la composante CO2 de la TVS , et de la composante de la TVS relative aux émissions de polluants atmosphériques.

Considérant d’une part, que la molécule d’hydrogène ne contient pas la moindre trace de carbone, et que, dès lors, son oxydation dans une pile à combustible… ne saurait ne produire que de l’électricité et de l’eau, sans la moindre trace de CO2
Considérant d’autre part que la combinaison de l’hydrogène et de l’oxygène, ne saurait pas davantage, quelle que soit la marmite utilisée, émettre le moindre polluant atmosphérique.
On se demande bien sur quelle base on aurait pu taxer un véhicule à hydrogène.

Dès lors avancer à 2021 au lieu de 2022 l’exonération d’une taxe pour laquelle ces véhicules devaient zéro euro au titre de leur motorisation électrique et rien au titre du CO2 ou de polluants atmosphériques, va sans aucun doute, booster formidablement leur développement. Grand merci à la commission du développement durable pour cette initiative d’une portée planétaire “monumentale”. Il eut été infiniment regrettable d’attendre 2022 pour graver ce “zéro absolu” dans la loi et l’audace du rapporteur dans l’Histoire !


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