Publié le 31 août 2011 | par Rédaction

On le subodorait depuis un moment, c’est fait ou presque. Pour réduire les déficits, la TVS va augmenter en 2012… soit en pratique au 1er octobre 2011.

Lors de la présentation des mesures de réduction des déficits, le mercredi 24 août dernier, François Fillon n’a pas détaillé oralement toutes les dispositions techniques… laissant aux ministres le soin de les expliciter chacun dans son domaine. Ainsi, même si vous avez suivi religieusement son allocution, vous n’avez rien entendu qui concernait la TVS. Pourtant dans le document remis à la presse figurait clairement la mention : “Révision du barème de la taxe sur les véhicules de sociétés, en cohérence avec le Grenelle de l’environnement (alignement sur le barème du bonus – malus)”, une révision en cohérence avec “le Grenelle” signifiant bien évidemment une hausse de la taxe. Mais l’alignement sur le bonus-malus manquait pour le moins de limpidité, vu que justement, les seuils d’application de la TVS et du bonus malus n’ont jamais montré le moindre début de cohérence.

Que dit le gouvernement ?

Situation actuelle : Les sociétés sont passibles de la taxe sur les véhicules de société (TVS) au titre des véhicules qu’elles utilisent, possèdent ou louent. Depuis 2006, la TVS s’applique selon un barème progressif assis sur la quantité de CO2 émise par le véhicule. Le barème de la TVS est demeuré inchangé depuis cette date alors que le parc automobile a considérablement évolué.

Sous l’effet du Grenelle de l’environnement et du soutien des pouvoirs publics à la réduction des émissions de CO2 du parc automobile, qui se sont concrétisés en particulier par les dispositifs du bonus/malus et de la prime à la casse, les technologies ont sensiblement progressé : le parc automobile se renouvelle vers des véhicules moins émetteurs de CO2, ce qui témoigne de l’efficacité de cette politique.

Mesure proposée : Il est proposé de réviser le barème de la TVS dans ce sens en favorisant les véhicules encore moins polluants, pour tenir compte de l’évolution du parc automobile.

Combien la révision va vous coûter.

Le document de presse ne précisait pas de nouveaux seuils ni de nouveaux taux de taxation, mais évoquait seulement huit exemples (voir tableau ci-dessous) qui permettent d’en estimer les contours.

Modèle TVS Actuelle TVS prévue Ecart en € Notre traduction
Dacia Sandero 432 540 108 4×108 108×5
Toyota Yaris 440 550 110 4×110 110×5
Nissan Qashqai 650 1300 650 5×130 130×10
Citroën C8 1550 2325 775 10×155 155×15
Ford Mondeo 2685 3043 358 15×179 179×17
Peugeot 607 v6 3451 3857 406 17×203 103×19

Si on observe les exemples de ce tableau, on peut aisément reconstituer pour chaque véhicule, le mode de calcul du barème actuel et du barème prévu. Ainsi on peut en déduire que pour l’essentiel, les seuils ne changeraient pas, mais seulement les taux de taxation : pour chaque tranche, on passerait tout simplement au tarif de la tranche supérieure.

Analyse élémentaire des exemples

Ligne 1 et 2 : La Dacia Sandero et la Toyota Yaris semblent correspondre à des versions émettant respectivement 108 et 110g ( seuil de TVS 101 à 120g). Taxée actuellement à 4€/g, cette tranche passerait à 5€/g.

Ligne 3 : Le Nissan Quasqaï correspondrait à une version émettant 130g (seuil de TVS 121 à 140g). Actuellement taxée à 5€/g), cette tranche passerait à 10€/g.

Ligne 4 : Le Citroën C8 serait une version émettant 155g (seuil de TVS 141 à 160g) Actuellement taxée à 10€/g), cette tranche passerait à 15€/g.

Ligne 5 : La Ford Mondeo évoquée serait une version émettant 179g (seuil de TVS 161 à 200g) Actuellement taxée à 15€/g), cette tranche passerait à 17€/g.

Ligne 6 et 7 : La Peugeot 607 V6 et la Jeep Cherokee en question sont des versions émettant respectivement 203 et 242g ( seuil de TVS 201 à 250g). Taxée actuellement à 17€/g, cette tranche passerait à 19€/g.

Ligne 8 : La BMW 550i GT émettrait 275g (seuil de TVS plus de 250g). Actuellement taxée à 19€/g) ,cette tranche passerait à 25€/g.

Projection de grille tarifaire

À partir de ces exemples, on peut donc (provisoirement) déduire la grille tarifaire suivante ; mais en traduisant les écarts non plus en valeur absolue mais en pourcentage on s’aperçoit qu’il sont moins indolores et – moins linéaires – que ne le laissait entrevoir le tableau gouvernemental.

Grammes de CO2/km Tarif actuel en €/g Tarif prévu en €/g Écart
– jusqu’à 100 g inclus 2 ??? ???
– de 101 à 120 g 4 5 + 25%
– de 121 à 140 g 5 10 + 100%
– de 141 à 160 g 10 15 + 50%
– de 161 à 200 g 15 17 + 13%
– de 201 à 250 g 17 19 + 12%
– à partir de 251 g 19 25 + 31%

Jusqu’à 100g… stand-by ???

Faute d’exemple sur les véhicules de jusqu’à 100g on ne sait pas ce qui les attend. Passeront-ils à 4€/g ou resteront-ils à 2€/g pour demeurer “incitatifs”, verra-t-on arriver de nouvelles tranches : par exemple jusqu’à 50g, de 51 à 80 et de 81 à 100g ? Tout est possible ! On se souvient notamment du conseil des ministres du 12 janvier 2011 où Nathalie Kosciusko-Morizet et Eric Besson avaient envisagé de limiter le super bonus décarboné de 5000€ non plus aux “jusqu’à 60g” mais seulement “jusqu’à 50g”. Et de créer dans la foulée un bonus intermédiaire de 3500€ pour les 50/60g “moins décarbonés que les plus décarbonés”. Quoi qu’il en soit, dans une approche de productivité de la TVS, tout cela n’a pas beaucoup d’importance, car pour l’immédiat ces véhicules à moins de 100g sont encore peu nombreux dans les entreprises.

Les plus de 250g pour l’exemple

À l’opposé la dernière tranche qui inaugure une tarification particulièrement sévère de 25€/g (sur trois ans de détention, l’impact dépasse 20.000€) n’est pas en fait le plus indigeste si l’on considère que les véhicules de ce niveau ne sont pas non plus légion dans les entreprises. Les constructeurs de ces modèles de très haut de gamme proposent souvent aux managers d’entreprise des versions diesels équivalentes ou presque, voire désormais de plus en plus souvent des versions hybrides, qui émettent moins de 200g et parfois beaucoup moins. Bref pour choisir aujourd’hui un véhicule à plus de 250g… disons qu’il faut le vouloir ! Et au besoin, il serait éventuellement possible de passer par les IK pour se faire oublier dans la franchise de 15.000€. Mais pour l’exemple le gouvernement les gratifie d’une augmentation de 31% apparemment méchante sinon productive.

Les petites et moyennes + 100%

En revanche l’addition sera beaucoup plus violente pour les modèles modestes et raisonnables : il paraît en effet découler des exemples cités par le gouvernement, une augmentation de 25% pour les véhicules émettant 101/120g (de 4 à5 €/g) et même de 100% pour les véhicules émettant 121/140g (de 5 à 10 €/g). Résultat les petites polyvalentes de segment B ou les moyennes inférieures de segment M1 que votre entreprise utilise depuis 3 ou 4 ans, qui payaient par exemple 440€ pour 110g de CO2 paieront 550€ soit un supplément de 25% et celles qui payaient 625€ pour 125g, paieront sur l’exercice 2012 le double, soit 1250 €. Enfin si vous aviez conservé quelques modèles à plus de 140g, l’impact sera de 50%. Et là l’impact est violent parce que c’est le cœur de cible. La règle de saine politique fiscale est donc respectée : il est préférable de taxer les pauvres, puisqu’ils sont plus nombreux.

Quand interviendra l’augmentation ?

Dans le document gouvernemental, il est précisé que : “le nouveau barème s’appliquera à la taxe due en 2012. La mesure, qui sera présentée en PLFSS 2012 aura un rendement de 100 millions d’euros pour la sécurité sociale.” Pour la déclaration à effectuer en novembre prochain, il n’y aura donc pas de changement.

Mais en fait de 2012 la mesure pourrait bien être, dans ses effets quasiment immédiate, et intervenir dès octobre 2011. Rappelons en effet que la TVS doit être acquittée au vu d’une déclaration (imprimé n° 2855) déposée au plus tard au le 30 novembre pour la période d’imposition qui s’étend du 1er octobre d’une année au 30 septembre de l’année suivante. Pour le dernier trimestre 2011, il risque fort d’être déjà trop tard pour faire le ménage dans le parc de l’entreprise. Mais pour tous les véhicules de 121 à140g qui arrivent à échéance de remplacement, il sera judicieux de ne pas perdre de temps.

Faut-il espérer du débat parlementaire ?

Sur le fond, rien ne serait en principe définitif, puisque les parlementaires auront à examiner les mesures dans le détail, mais vu le trou abyssal à combler dans les déficits publics, les 100 millions d’euros escomptés de cette augmentation de la TVS risquent fort d’être adoptés “sans vagues ni murmure”. Le gouvernement aura beau jeu de souligner que les règles de la TVS n’ont pas changé depuis la loi de finances 2006 alors que les taux de CO2 des véhicules ont été fortement réduits, entraînant une forte baisse du produit de la taxe. Il faut donc s’attendre à un discours d’autosatisfaction qui démontre l’efficacité de sa politique incitative. L’augmentation de 100% c’est pour votre bien ! Les vertus de la pédagogie sont impénétrables.


Avec “la clope et la picole”.

Dans le document premier-ministériel du 24 août, cette révision du barème de la TVS se cachait dans le 3éme paragraphe Intitulé “Modifier les comportements en matière de santé publique et d’environnement” ou après l’augmentation du tabac, des alcools forts et des boissons sucrées, apparaissaient donc, en compagnie des substances de luxure et de dépravation… les véhicules de société ! On n’en fera pas un casus belli ! Dans cet inventaire à la Prévert de mesures fiscales, il fallait bien mettre l’augmentation de la TVS quelque part, mais l’endroit choisi semble quand même révélateur d’un état d’esprit indécrottable. Le véhicule de société n’est pas évoqué comme un outil de travail, comme une part essentielle du marché automobile, de la filière industrielle, ou de l’activité économique, mais comme une dérive de comportement…

Autrefois dans les années 50/60, Eddie Constantine chantait : “Cigarettes, whisky et petites pépées”, aujourd’hui plus personne n’oserait évoquer les petites pépées au risque de se retrouver au pilori du féminisme militant. Les voitures de société ont donc pris la relève… après “la clope et la picole”. Bien sûr, vous ne serez pas condamnés aux pénitences corporelles, on vous épargnera le jeun, la flagellation et le cilice, mais néanmoins, comme il convient de morigéner, on augmentera la TVS de ces objets de luxure et de débauche.

Peut-être un jour comprendra-t-on que, consentant ou pas, le citoyen est adulte, qu’il n’a que faire des prétentions de “pédagogie” (du grec παιδαγωγία, éducation des enfants), ni des justifications naïvement moralisatrices de l’impôt. À la rigueur certaines dispositions fiscales pourraient nécessiter une explication qui relèverait de la didactique, mais là, il n’en est rien puisque l’augmentation prévue vise essentiellement à faire du chiffre et de la productivité fiscale en tapant “au centre” du parc automobile des sociétés : les véhicules de 101 à 160g, de très loin les plus nombreux.


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