Publié le 18 mars 2022 | par Jean-Pierre Durand

Comme il est d’usage à l’approche d’échéances électorales, la fiscalité automobile semblait ne rien prévoir pour 2022 que l’on ne sache déjà. Mais à y regarder plus attentivement on voit que, l’ex-TVS “consolide“ sensiblement son champ d’application, que la baisse du seuil de malus même “programmée” n’est pas anodine et la nouvelle puissance fiscale encore moins. De plus, depuis janvier, il faut oublier les articles 1007 à 1012 du CGI qui sont abrogés. Bienvenue dans les 166 articles qui les ont remplacés – sur ordonnance – au nouveau Code des Impositions des Biens et Services.

La fiscalité automobile emménage au nouveau CIBS

Habituellement quand la législation évolue, même pour un détail rédactionnel de forme, ce détail fait l’objet d’un amendement voté en séance par le Parlement. Cette fois, il a suffi d’un décret publié au JO du 29 décembre pour que sans plus de débat et d’information publique, le 1er janvier, des pans entiers du Code Général des Impôts, passés à la trappe, soient remplacés par un nouveau Code des Impositions sur les Biens et Services. Alors que campagne présidentielle est engagée, personne ne semble s’émouvoir de voir la fiscalité réécrite par ordonnance. Décidemment la Covid aura laissé bien des séquelles !

En principe à droit constant

Ce tsunami a bien sur emporté tous les textes sur les taxes appliquées aux  véhicules à moteur, énoncés dans le CGI, des articles 1007 à 1012 quater. Ces textes ont échoué au CBIS mais pas à l’identique, tout est réécrit et redistribué et s’étale désormais du 421-1 au 421-166.  La simplification est “en marche”.

En principe cette nouvelle codification doit se faire à droit constant mais il n’est jamais simple d’arbitrer les interprétations de la doctrine fiscale ou les transpositions du droit de l’UE dans le droit français. Rappelons que c’est à une transposition (en avril 2009 de la directive 2007/46/CE abrogée depuis par le règlement 2018/858) que l’on doit les contentieux des N1 à usage multiples et des pick-up.

Nous a avons ainsi connu les véhicules “de tourisme au sens du 1010 du CGI” puis “de tourisme au sens du 5° du 1007”. Désormais “de “tourisme au sens du L421-2 du CBIS”, ils ne sont plus “destinés au transport de voyageurs et de leurs biens” mais “affectés au transport de personnes”. A première vue cela ne change rien… À confirmer !

Le Code des Douanes peut en cacher d’autres

En fait ce chambardement légistique trouve son origine dans la loi de finances (2019-1479) pour 2020. Cet article 184 avait habilité le gouvernement à procéder par ordonnance pour ouvrir un grand chantier de légistique qui prévoyait – dans un délai de 18 mois et dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution – de prendre : “toutes mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la refonte des impositions et amendes mentionnées au 1° du même article”. Et s’il était fait expressément mention dans ce 1° : du Code des douanes, du Code du cinéma et de l’image animée et du Code rural et de la pêche maritime. Mais tel qu’annoncé ce transfert de codes semblait prioritairement axé sur le Code des Douanes pour s’inscrire dans le cadre du transfert de compétences entre la Direction Générale des Douanes et Droits indirects et la Direction Générale des Finances Publiques. Transfert de compétences vendu à l’opinion comme une “rationalisation” de services publics…

C’était flou, et donc…

Toutefois, rien dans cette affaire ne paraissait devoir concerner directement la gestion de parcs automobiles des entreprises, laquelle ne se soucie guère du Code des douanes, à l’exception de son art. 265 qui tarifie la TIPCE.

Toutefois en décryptant l’article 184 on aurait pu remarquer que l’habilitation à procéder par ordonnance, concernait également “toute autre imposition frappant, directement ou indirectement, certains produits, services ou transactions ainsi que des autres régimes légaux ou administratifs relatifs ou se rapportant à ces impositions et amendes, produits ou services” . Le flou de l’énoncé pouvait interpeller puisque comme chacun sait, “si c’est flou… ”

Un large abandon de compétences

L’habilitation étant accordée pour 18 mois le 28 décembre 2019, l’ordonnance devait être publiée au plus tard le 28 juin 2021, et suivi un projet de loi de ratification déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois. Pour cause de Covid et “en même temps” parce que le projet avait exploité toutes les possibilités de l’abandon de compétences concédé par le Parlement, pour procéder à la recodification des dispositions ayant trait aux impositions  sectorielles au sein d’un nouveau code, dédié aux impositions sur les biens et les services,  cette ordonnance était devenue un serpent de mer. qui a nécessité deux prorogations de l’habilitation.

En attendant la TVA et autres impositions sectorielles

À la lecture de ce nouveau CIBS on remarque que l’on passe du Livre Premier « Dispositions générales” au Livre III : “Énergies, Alcools et Tabacs” suivi du Livre IV « Autres impositions sectorielles” ce qui promet à l’évidence une suite… et pour le moins un insert pour un Livre II. Le gouvernement n’en fait pas mystère en expliquant que, cette nouvelle présentation des impositions, regroupées par secteur d’activité centrée dans un premier temps sur les énergies, les alcools, les tabacs, les transports et l’industrie, sera étendue à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et aux autres impositions sectorielles sur les biens et services.

Valeur législative ?

Reste la question de la ratification par le Parlement qui devrait intervenir dans un délai de trois mois voire avant la fin, anticipée pour cause d’élection présidentielle, de la session parlementaire sinon de la législature. Au moment où nous écrivons ces lignes, le projet de loi n’est pas inscrit à l’agenda. Toutefois, comme il semblerait très aléatoire de compter sur une quelconque faille juridique pour espérer s’affranchir des différentes taxes sur les véhicules à moteur nous avons rédigé ce dossier sur la base du nouveau CIBS plutôt que sur celle de textes abrogés.

Ce qui change ou pourrait changer…

– Les deux composantes de la TVS changent de nom pour taxer les véhicules de tourisme “affectés à des fins économiques” (TAFE) et étendre leur champ d’application aux automobiles utilisées pour la réalisation d’activités assujetties à la TVA, ce qui est sensiblement plus vaste que “les véhicules détenus ou utilisés par les sociétés” et peut notamment inclure ceux du secteur associatif ayant des activités lucratives et concurrentielles. Les périodes d’imposition des TAFE s’apprécient désormais en jours, mais peuvent encore se définir en trimestres.
 
– Le malus commence à 128g WLTP soit l’équivalent de 100g NEDC et plafonne à 40000€ à partir de 224g WLTP. S’y ajoute cette année un malus au poids à partir de 1800kq de masse en ordre de marche, mais qui exempte les VE et les PHEV qui disposent d’une autonomie électrique urbaine de plus de 50km.
 
– La puissance administrative est depuis l’an dernier, basée sur un nouveau calcul qui ignore le taux de CO2 pour ne plus tenir compte que de la puissance réelle du ou des moteurs. Pour l’immédiat cette puissance n’impacte que la taxe régionale sur les cartes grise…
 
– Les IK conservent leur dégressivité de TAFE selon le kilométrage et leur franchise de 15000€ par entreprise. Quant au barême fiscal de référence, il augmente de 10%
pour compenser l’inflation et les hausses des carburants.

Retrouvez les différents chapitres de cette loi de finance ci dessous :

1/ Les deux TVS deviennent deux TAFE

2/ Malus : il devient doublement “pesant”

3/ Bonus : les PHEV exclus au 1er juillet

4/ Le cheval “fiscal” est prêt pour un avenir décarboné

5/ Les IK : adaptables aux circonstances

6/ La TVA : l’essence comme le gazole

7/ Avantages en nature : abattements pour les VE

8/ Amortissement : les 25 ans du plafond

9/ Carburant : Entre Ukraine et Iran

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